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dimanche 15 novembre 2015

Nudité et abandon

Une phrase qui se dit dans un hôpital, en tout cas c'est là que je l'ai entendue pour la première fois, est : " Dans un hôpital, votre corps ne vous appartient plus."
Cela a commencé tout de suite en réanimation, où je me suis découvert avec des tubes dans le nez à la fois pour me nourrir et pour m'injecter des médicaments. Puis ce furent les soins du corps, à commencer par la toilette de la tête aux pieds, y compris les parties intimes. Plus tard, j'allais découvrir l'habillage, les repas toujours servis avec l'aide d'une personne, puis la douche, et j'en passe...
Très vite on est confronté à la nudité, que ce soit devant une ou plusieurs personnes,sachant qu'il y a essentiellement des femmes dans les équipes de soins. Ce passage obligatoire peut être vécu de différentes manières selon chacun.

A un moment je me suis senti nu, dépouillé, à la merci de mains étrangères, et j'ai eu la vision du Christ en croix dans l'abandon à la situation, d'une toute autre ampleur en ce qui le concerne. Quelque part je me sentais effectivement dans cet abandon, absolument nu, sans aucune référence personnelle, et dans l'incertitude la plus complète quant à mon avenir. Je me suis même senti  dans une parfaite sérénité. Je ne dis pas que cela m'arrivait tous les jours, mais l'ayant vécu assez vite,ce fut certainement une aide pour la suite.

Je fais partie des patients à charge lourde, c'est à dire complètement dépendant.
En quelques secondes, passer d'une vitalité et d'un bien être tout à fait réel, puis échapper de justesse à la mort, pour finir dans un hôpital, assisté jour et nuit, pour un temps indéfinissable.
Tout cela contribue à rogner l'ego de façon efficace, et à s'accorder sur le fait que l'on ne maîtrise pas grand chose.
En même temps, j'allais découvrir une sorte d'évidence dans ce que l'on peut considérer comme une situation vraiment difficile, à savoir que je n'ai pas le choix. C'est plutôt quand la vie est facile que l'on peut sentir que l'on a le choix, ou du moins y croire. Plus la situation devient difficile, plus le choix devient évident, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de choix.
Où le choix pourrait-il se faire? Il y a une dépendance complète à une situation pour le moins peu ordinaire. Je dis que c'est plus facile d'accepter le non-choix que de songer à négocier un choix hypothétique. Dans le même ordre d'idée, je considère qu'il est plus facile de pratiquer quand "ça va mal", que lorsque tout va bien, où il est si facile de dormir!
La difficulté peut être une opportunité...

1 commentaire:

ipapy a dit…

Salut mon frère, je viens de découvrir que tu as repris le Blog et je viens de lire tous tes nouveaux messages. Merci de ce partage et merci de ton exemple. Avec toi mon ami par le coeur