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vendredi 7 juin 2013

La puissance discrète du hasard

Lorsque j'ai découvert ce titre de livre, annoncé dans l'agenda de juin de la librairie Mollat, je le notais avec délectation dans mon propre agenda. Les premières phrases de présentation annonçaient : "Découvertes inattendues, rencontres singulières, coïncidences troublantes, l'essentiel arrive souvent par hasard..."
Rien que cette dernière phrase, l'essentiel arrive souvent par hasard, est osée dans notre monde dominé par l'apparente maîtrise des choses et l'esprit volontariste.

Je ne connaissais pas l'auteur, Denis Grozdanovitch, mais le sujet, oui, si je peux dire. J'ai déjà fait état de ces moments de synchronicité, de rencontres fortuites, opportunes, comme si la vie, dans son mystère le plus profondément intime et inexplicable, cherchait à nous faire signe à des moments particuliers dont elle avait le secret. Côtoyer cette frange du vivant m'émerveille. J'ai déjà un peu lu sur le sujet, alors écouter quelqu'un qui a écrit un vrai livre sur le hasard est un devoir délectable pour le féru que je suis.

Et j'ai été comblé. L'homme parle bien, rentre dans le détail, approfondit le sujet, l'élargit même, avec citations, références, tout en restant modeste. Il est d'une érudition rare, mais s'appuie sur sa propre expérience ainsi que sur d'autres dans des domaines divers mais aux constats convergents. Même sur des sujets dits scientifiques, voire mathématiques, il explique qu'à un certain niveau, la progression logique que l'on peut constater fait soudain, sans que rien ne puisse le prévoir, un saut, un écart. En d'autres termes, le vivant, dans sa complétude extrême, ne peut être quantifié de façon exacte et définitive, sa complexité dépasse à un moment la mise en équation par l'esprit humain saisisseur.
En simplifiant on pourrait dire qu'il y a deux attitudes : la psychorigidité et l'ouverture d'esprit. C'est moi qui le dit ainsi, mais il a bien parlé de ça, et du psychorigide et du lâcher prise. Je n'ai pas souvenir qu'il ait parlé d'abandon... mais n'est-ce pas la même chose?

Il a cité quelques exemples magnifiques de coïncidences frappantes. Rien que ça nous rend petit, enfin c'est ainsi que je le sens.
Il écrit  dans ses carnets depuis l'adolescence, il en est à 182, qui sont devenus des livres maintenant, dont les titres sont des voyages en soi, comme d'ailleurs les chapitres de son dernier livre : la vertu magique de la rencontre, ce qui cogne à la vitre, une bienveillante sollicitude, au bon endroit au bon moment, au mauvais endroit au mauvais moment, vaut-il mieux ne vivre qu'à moitié, la vie est-elle un songe, est-il encore permis de flâner, les hommes ne viennent plus par ici, ne pas laisser s'embroussailler les chemins du désir, qui a peur de l'éternel féminin, je ne puis douter que je doute donc je suis, la science se serait-elle fourvoyée, cette obscure clarté, une précision subversive, un contact amical avec l'immense complexité du monde...

Après la présentation, attendant mon tour, livre en main, comblé et souriant, pour une rencontre plus que pour une dédicace, il se tourna soudain vers moi en disant : "On se connaît?"
Quelque part, oui, à n'en pas douter...



6 commentaires:

soisic a dit…

Bonsoir Yannick..je crois que je vais acheter ce livre :) connais tu le livre de Jean- François Vézina : les hasards nécessaires ( la synchronicité dans les rencontres qui nous transforment) aux éditions de l'homme..j'ai bien aimé aussi

Alexia Simart a dit…

Je suis tombée "par hasard" sur une interview à La Grande Librairie de cet auteur, au sujet de ce livre, et cela m'a passionné : enfin un homme qui donne du poids à l'inexplicable, et qui ose dire que la vie n'est pas que l'effet de la logique. Un grand bol d'air, une porte qui s'ouvre ! Merci d'avoir parlé de ce livre, ça me donne encore plus envie de le lire !

yannick a dit…

Soisic : je ne connais pas le livre de Vézina. Là ce qui m'a interpelé tout de suite ce sont les mots du titre : associer puissance et discrétion au hasard est gonflé. La lecture du livre, et l'écoute de sa présentation montrent bien que c'est vrai. Mais il parle aussi du fait qu'il y a des gens à hasard, c'est à dire une disponibilité à l'observation, un certain art en quelque sorte. Oui vraiment je te conseille de le lire.

Alexia : Oui il est sensible et érudit ce qui permet d'aborder le sujet sous différents angles.

Bonne lecture à toutes deux.
Le livre fait 320 pages et coûte 17,50 euros.

Acouphene a dit…

Merci Yannick...

philippe a dit…

Oui,nous vivons dans une société où tout est à prévoir,erreur!!!Bien il faut prévoir mais aussi faire face à l'imprévu!

Merci.

Dominique a dit…

Suis-je passé ici par hasard ?