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mardi 11 juin 2013

En voiture...

- Imagine que tu es en ville, et que tu vas aller d'un point de rendez-vous à un autre. OK?
- OK.
- Bon, tu es en voiture, tu sais que en gros, avec les feux, vue l'heure à laquelle tu pars, tu vas mettre à peu près une demi heure. Disons que c'est ton fonctionnement courant, tu ne penses pas à plus, et tu pars.
- OK.
- Mais sans t'en apercevoir vraiment, c'est en fait rentré dans ton inconscient, et tu mises sur la demi heure, disons à 5 minutes près. T'es d'accord?
- Oui.
- Donc tu es d'accord d'avance pour que les choses se passent comme ça, alors qu'en fait tu n'es sûr de rien sur le parcours, tu sais juste que si tout se passe normalement, cela prendra effectivement à peu près une demi heure.
- Oui.
- Imaginons maintenant que tu rentres dans ton tableau de bord de cerveau d'autres données. Par exemple : il y a des personnes qui vont conduire très lentement et du coup la dizaine de feux que tu vas traverser seront rouges alors que tu aurais eu envie qu'ils soient verts. Peut être que normalement il y en aurait eu la moitié de rouge et l'autre moitié vert en arrivant. Du coup tu perds 3 minutes, ou plutôt tu passes 3 minutes de plus à attendre.
- D'accord, c'est possible.
- Mais comme tu imaginais qu'une bonne partie serait vert, tu sens une sorte de barrage par rapport à ton idée d'avancer, et tu commences à t'énerver et à vouloir aller un peu plus vite.
- Oui ça c'est vrai.
- Et puis sur la route à deux voies, il y en a une avec un camion arrêté pour raisons professionnelles, ce qui provoque un ralentissement. Au début tu ne vois rien, et tu râles, puis quand tu arrives au camion, tu comprends, et ça passe un peu mieux. Mais on est à au moins 5 minutes de plus.
- Oui j'ai déjà vécu ça plusieurs fois.
- Tu n'étais pas venu par là depuis quelque temps, et tu découvres qu'il y a des travaux dans le secteur. Pareil, il n'y a qu'une seule voie, puis une déviation. Finalement tu suis le mouvement qui te fait arriver à un autre endroit. Tu ne peux récupérer la rue en question ensuite à cause d'un sens unique, et finalement tu refais un grand tour qui te fait perdre encore 5 ou 6 minutes.
- Oui, c'est pas de chance, mais ça pourrait arriver.
- Il ne reste plus qu'à trouver une place pour se garer. Tu fais un premier tour, mais tu n'en trouves pas. Tu décides de te garer un peu plus loin. Du coup il faut marcher à pied. Et hop 5 minutes de plus.
- Oui.
- J'ajoute la pluie ou pas?
- Au point où on en est, peut être pas!
- Oui mais vu le temps en ce moment on peut admettre qu'il y ait un risque.
- Donc tu veux que j'arrive en retard et mouillé?
- Non, non, je ne veux rien. j'imagine juste des scénarios qui ne me semblent pas impossibles.
- Allons-y pour la pluie.
- Donc tu reconnais qu'un trajet estimé à une demi heure pourrait prendre 20 minutes de plus.
- Oui, c'est logique dans ce que tu décris.
- Question : Est-ce que les choses dont on vient de parler ont le droit d'arriver?
- Je ne vois pas comment je pourrais les en empêcher, si elles sont là.
- OK, donc c'est possible, pas certain, mais possible. De la même manière quand tu prends ta voiture pour aller quelque part, est-ce que tu envisages l'imprévu possible ou comme une erreur inenvisageable?
- C'est vrai, je n'imagine pas l'imprévu.
- C'est le fonctionnement naturel. Imaginons maintenant que l'imprévu soit l'inverse. Il n'y a presque personne sur la route, tous les feux sont verts, tout se passe bien et tu mets 12 minutes de moins que la demi heure estimée.
- Ca, c'est super!
- Et pourquoi?
- Je gagne du temps!
- Et alors?
- Je préfère en gagner qu'en perdre!
- Et tu en fais quoi, tu le mets où?
- ...
- Es-tu d'accord pour admettre que si tu as en tête que des imprévus peuvent se passer, cela t'aiderait à moins t'énerver au volant, à rester calme, et à moins te soucier du temps, quitte à prendre une marge de sécurité.
- Oui ce serait un confort.
- Le vrai confort est bien de reconnaître que tout peut arriver, y compris l'imprévu, que le retard est possible comme l'avance, et que finalement, même si on peut envisager certaines choses, nous ne sommes absolument sûr de rien du tout.
- Oui, c'est vrai.
- Ce que je veux dire, c'est que si on garde cette notion que tout peut arriver, on reste ouvert à tout ce qui se présente comme étant non seulement possible, mais juste, puisque tout un tas d'évènements ont fait que cela se passe ainsi.
- Oui, c'est vrai.
- Le monde extérieur n'est pas contre toi, ni avec toi, il est, c'est tout. Si tu ne veux pas d'embouteillages en ville, vis à la campagne, mais ce sera autre chose, d'autres avantages, d'autres contraintes.

Ne projette pas trop. Tout peut arriver. De quel droit refuser que ce qui arrive soit?

4 commentaires:

Acouphene a dit…

C'est un refus de priorité laisser à la Vie
Bon je vais partir ce soir au boulot pour être sûr d'arriver demain matin...

philippe a dit…

Est-il possible d'imprimer cette histoire et où?J'afficherai sur mon lieu de travail.

Oliver a dit…

Superbe histoire, une démonstration magistrale !

yannick a dit…

Acouphène, tu me fais rire!

Philippe, imprime dans ton cerveau, et laisse les autres vivre ce qu'ils vivent. Maintenant si tu veux l'afficher partout, ou le mettre sur les pare brises des voitures au parking, why not?

Merci Oliver.